Si madame Anne-Laure Lafaye lit ce message...
Sur la porte vitrée d'une boutique de Venise il y avait un message personnel. J'ai pensé que peut-être internet pourrait l'aider à trouver sa destinataire...
C'est ce que Veuve Tarquine a écrit le 10/05/2012
De bric en vrac
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Commentaires
J'ai consulté les pages blanches.
1621 Lafaye en France!
Lafaye A.L en Gironde.
Tu sais qu'en mars dernier, je logeais juste à coté de la boutique? (en face de l'autre coté du pont) Tous les jours je passais devant en me demandant combien de temps ils laisseraient l'affiche. Ils sont gentiment tenaces quand même :)
Quel plaisir de savoir que la Legatoria Piasezzi existe encore ! Elle est dans ce texte, écrit il y a un quart de siècle :
LA FILLE DE L’AIR
Venise justement, mais quelques années après, et en famille. Le chien manque, un mal-voyant du cœur l’a fauché sur le bas-côté de la route. Fini les chiens, inutile de les faire entrer dans nos vies pour qu’ils en sortent dans des trous sous une pierre plate au fond du jardin.
Mère et enfants vont profiter des petites connaissances de papa-guide : préférer les itinéraires bis aux axes principaux, les rues désertes à leurs voisines huppées mais encombrées de touristes, les places où poussent les chats lents à celles où poussent les piétons coureurs. Préférer les premières heures du jour, quand les monuments sont indemnes de papillons à caméscopes. Chercher telle maison perdue des Frari, ses murs vérolés par l’eau du canal portant mille moulinets en plastique, multicolores. Cette boutique vouée au papier marbré, tenue par une dame aussi vieille et distinguée que la Sérénissime. San Zaccharia, où pour nous seuls s’éclaire une paisible madone de Bellini. L’Arsenal, qui fait marcher beaucoup avant de donner sa haute beauté solitaire. Aller quand même au Florian, d’un renom nettement plus justifié, cadre, service et produits, que celui du Harry’s Bar où, pour avoir voulu occuper la même banquette fatiguée qu’Hemingway, nous bûmes bien lentement le baccardi le plus cher de la planète.
Et surtout, le soir tombant, marcher tranquillement sur la Riva degli Schiavoni, vers le terminus du vaporetto à la pointe de l’île. Attendre sans hâte en goûtant les lumières qu’arrive le dernier, l’accelerato qui, lentement bien sûr, honorera tous les arrêts, descendant le Grand Canal de palais en palais sortis de la nuit pour donner leurs façades. Nous sommes seuls à bord avec des Vénitiens, redevenus maîtres de leur ville, qui n’en aiment que mieux l’offrir à nos enfants courant heureux aux deux bords du bateau selon les débarcadères.
Arrivés Piazzale Roma, nous attendons le bus vers la terre ferme, banale. Noémie, tout à ses cinq ans, empoigne d’un air décidé la ganivelle de protection pour une acrobatie qui la jette, tête en bas, au bitume. Hurlements, sang coulant, etc. Aussitôt c’est l’éruption. Les gens s’emparent de la bambina – Santa Madona, il faut mener la bambina à l’hôpital – la madame là elle est infirmière – et la bambina ; et impossible d’expliquer qu’une plaie au cuir chevelu est plus spectaculaire que grave ; et si sa mère veut arrêter le sang avec de la glace, on pille illico le proche marchand de gelati ravi de sauver la bambina. Notre famille monte dans le bus : c’est presque l’arrêt entier qui veut suivre, et vraiment vous ne voulez pas qu’on l’emmène à l’hôpital, et ce n’est pas raisonnable, et la bambina, et... Le bus arrivant au camping bruit encore de l’inquiétude de ceux qui ont partagé notre retour, bien que le corps du délit, dûment chapitré, sache déjà dire « grazie mille » à ses sauveteurs.