Quand il ne faut pas braver le pistolet de départ... ou bien si.
Le nez dans le guidon. Pour ne pas s'arrêter, pour
ne pas
lever le nez et surtout ne pas se retourner.
Le rythme est quasiment constant et si rassurant...
Pour une raison que je ne comprends pas bien, hier matin j'ai mis les
freins. J'ai ralenti et même posé un pied
à terre. Pas longtemps mais suffisamment pour jeter les yeux
derrière moi.
Peut-être pour mesurer la distance parcourue
Peut-être que je me croyais suffisamment loin pour
être hors de danger.
Peut-être aussi que j'étais fatiguée et
que j'ai eu envie de me reposer quelques instants.
Alors j'ai tourné la tête.
Mais ce n'est pas le chemin écoulé que j'ai
contemplé. Non, soudainement c'est sur la ligne de
départ que je me suis retrouvée, envahie par les
émotions qui vous vrillent les tripes quand vous n'avez
d'autre choix de vous aligner et de tenter de combattre.
Elle m'a pris à la gorge encore une fois.
La peur.
La peur qui me dévorait.
La peur qui hantait mes nuits et mes journées.
La peur qui me tordait aussi sourde que puissante, aussi coite que
vorace.
La peur qui fait vomir
La peur qu'on tait à tout prix parce qu'il n'y a pas d'autre
choix que de la subir, pas d'autre choix que de serrer les dents et
d'avancer, même dans le plus sombre des cauchemars.
La peur qu'on nie mais qui vous ravage silencieusement.
Jamais je ne l'aurais avouée.
Je ne pouvais pas perdre.
La peur de plomb, la peur qui plombe.
Moi l'expansive, moi l'ostensible, je ne me souviens pas avoir jamais
dit la terreur qui me tenaillait.
Et puis hier en tournant innocemment les yeux, je me suis
retrouvée face à elle. Elle que j'avais mis tant
d'obstination à nier, elle si forte quand je croyais l'avoir
oubliée.
Je me suis recroquevillée sous la couette,
estomaquée, assommée. J'ai replié mon
corps pour offrir le moins d'aspérités.
Car on ne combat pas cette peur là, on fuit en priant pour
qu'elle vous laisse en paix.
Impuissante ironie, hier tu n'as pas suffit.
Oui, je crois que l'innommable, l'abject c'était la peur
avec laquelle je vivais.
La peur de comprendre, la peur des cris qui résonnent dans
la nuit, la peur des sirènes, la peur... , la peur de leur
pleurs... , la peur ... Et faire face et tenir. Et... et... et la peur qui ne vous lâche plus, même quand tout a disparu, la peur de sa vie... Et puis la peur pour seul avenir, celle-là elle vous cueille quand vous êtes déjà à terre et elle vous lamine au plus profond...
Et quand on a repris quelques souffles remonter sur sa selle. Et filer
loin. Histoire de s'en moquer. Bravades, peut-être. Mais il
est des temps dans la vie où les bravades sont la seule
chose qui vous restent. Et dans ces moments-là les bravades
sont précieuses...
C'est ce que Veuve Tarquine a écrit le 06/05/2007
Tréfonds et sentiments
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Commentaires
Peut-être que c'est en voyant les choses telles qu'elles sont qu'on arrive à vivre avec, qui sait?
Pensées affectueuses. m.
Je vous dépose ici un halo de lumière.
Une fidèle lectrice
Nancy
Cette peur-là, elle court tellement vite que filer ne suffit pas lui échapper. Elle nous dépasse et nous attend tapie dans l'ombre pour nous retrouver à nouveau !!!!!!!!!!Elle n'est pas humaine cette peur, c'est pourquoi elle nous fait si ........ peur.
Que faire ? tenter de vivre avec elle puisque nous ne sommes que des humaines, pas n'importe quelle humaine quand même. Ce que nous avons vécu (mon mari habite la même adresse que le vôtre) et ce que nous vivons reste du domaine du mythe de Sisyphe. Notre rocher est difficile à escalader et comment ne pas "dévisser" parfois ?
Salutaire écriture ?
Claudine
...mais vous avez fait tellement preuve de courage jusqu'ici ! Vos enfants sont magnifiques, vos écrits superbes...je vous lis et vous suis... Je vous envoie de la chaleur, de la tendresse de notre région du Sud !